A la tête de la compagnie In Vitro, Marine Mane dissèque les relations humaines par tous les moyens.


A PROPOS DE MARINE MANE, metteure en scène à l’origine des Laboratoires de Traverse. Compagnie IN VITRO.

A la tête de la compagnie In Vitro, Marine Mane dissèque les relations humaines par tous les moyens.

Devenue metteure en scène au tournant des années 2000, elle s’appuie sur un répertoire contemporain pour éprouver ce qui se joue entre les êtres et explorer les mécaniques qui nous construisent.

Passionnée par les dessous de la langue, elle engage les corps dans la bataille, imaginant des dispositifs sensoriels et immersifs à l’aide d’équipes à géométrie variable.

En 2011, elle présente ainsi Dans la solitude des champs de coton, de Bernard-Marie Koltès, dans une configuration quadrifrontale pour deux comédiens et deux musiciens.

Animée par le désir de replacer la recherche au cœur de l’acte de création, Marine Mane impulse en 2012 les Laboratoires de Traverse, sessions d’expérimentation collective qui permettent à des artistes de toutes disciplines de se remettre en jeu sans se soumettre à de quelconques impératifs de production.

A partir des enjeux mis en lumière sur les premiers laboratoires, elle lance sa compagnie dans un processus à long terme autour de la trace, de l’empreinte.

Creusant le sillon de ces précédentes mises en scènes, qui révélaient des corps blessés, malmenés, et/ou dépassés par le désir, elle cherche à ausculter les traces, intimes et politiques, que dessinent les parcours individuels et collectifs.

Avec La tête des porcs contre l’enclos, création In Vitro prévue à l’horizon 2015, elle prend le chemin d’une écriture personnelle. Confiant sa voix à un circassien, un plasticien et un musicien, elle esquisse, par « calques », une cartographie corporelle et émotionnelle, visuelle et sonore. Sur les traces d’une jeune femme, égarée en territoire familial violent.

MARINE MANE, PIECE APRES PIECE

Premières armes

Après avoir suivi les formations de la Sorbonne Nouvelle en Arts du Spectacle, Marine Mane intègre les classes de la Comédie de Reims, où elle fonde une compagnie, La Tramédie. A sa sortie d’école en 2000, elle devient un temps l’assistante de Christian Schiaretti.

Entre 2002 et 2005, Marine Mane est accueillie avec La Tramédie en résidence au Théâtre Ici et Là de Mancieulles, en Lorraine. Elle y lance de premières expérimentations sensorielles avec les anciens ouvriers du carreau de mine (autour de Valère Novarina, Pierre Bourdieu, Pascal Adam).

Le corps malmené

En 2006, elle met en scène des comédiens (adultes) qui jouent les enfants qui jouent à la famille. Et adoptent le langage de la guerre, pour se dépeindre en éternels orphelins de parents trucidés. (Histoires de Famille, de Biljana Srbjanovic).

En 2007, elle monte un spectacle tout public en bi-frontal, dans un décor peint par un street-artiste. Face à un loup aux airs de chaplinesque « dictateur », Le petit Chaperon Uf (de Jean-Claude Grumberg) y perd sa bataille contre les plus arbitraires des lois.

En 2008, elle met à nu et en chansons les affres du désir féminin, exorcisant par la dérision les peurs, attentes et impossibilités qui se cognent à nos révolutions intérieures. (Le Cabaret, de Marine Mane).

En 2009, elle crée un théâtre visuel et physique autour de deux corps blessés qui se dévoilent malgré eux, dans un climat de désir attisé par la différence de statut social et le spectre de la grande peste. (Une puce, épargnez-la, de Naomi Wallace).

En 2010, elle confie à une non-comédienne le monologue inspiré par les journaux intimes d’un jeune homme ayant retourné une arme contre profs et élèves de son lycée, avant de se suicider. (Le 20 novembre, de Lars Noren).

En 2011, elle se fait accompagner d’une chorégraphe pour inviter deux comédiens, un batteur et un contrebassiste à s’affronter comme sur un ring autour de la mécanique du désir. (Dans la solitude des champs de coton, de Bernard-Marie Koltès).

Depuis 2012, elle invite des artistes de tous horizons à expérimenter collectivement sur les Laboratoires de Traverse, sessions de recherche sans obligation de résultat, désormais indissociables de sa démarche de création.

La Tramédie laisse alors la place à la Compagnie In Vitro.

En mars 2015, Marine Mane crée La tête des porcs contre l’enclos, associant un acrobate-danseur, un dessinateur et un musicien électro-acoustique à une forme non conforme autour d’un corps désaxé, d’une voix venue d’ailleurs, et de lignes de fuites inconscientes et (géo)graphiques.

A mon corps défendant (octobre 2017) est une ode à ce qui résiste. Cette pièce, pour quatre interprètes venus du cirque et de la danse, un musicien, un plasticien et un vidéaste, explore le champ chorégraphique tout en stimulant une expérience physique de l’œil et de l’oreille. Elle met en relation messages, photographies, vidéos, conversations et enregistrements sonores récoltés dans des correspondances numériques entretenues entre Marine Mane et plusieurs témoins des zones de conflits actuels (Syrie, République Démocratique du Congo, Afghanistan, Israël). Les points de vue sur ces territoires se mélangent, entre la perception intime et ambiguë de la cause que chacun des correspondants a choisie de supporter et ce que nous croyons en connaître.

Atlas (2019) : Depuis son apparition sur terre, l’homme mène une lutte inconsciente pour se maintenir debout et en mouvement.  Si cette première lutte est gravitationnelle, l’homme s’est en même temps construit en réaction et en relation avec les éléments naturels: la terre, l’eau, l’air, le feu. Les figures et postures physiques qu’il déploya pour y faire face ont marqué son évolution. Dans un double mouvement de confrontation et d’intégration, il s’est maintenu ainsi en équilibre.  Et si l’homme avait intégré ces premières confrontations inconscientes comme un moteur essentiel à sa survie  et à son développement ? Si ces mouvements de lutte lui étaient indispensables ? Qu’ils prennent la forme, et selon les époques, de luttes physiques, politiques, sociales, religieuses… ils racontent avant tout une histoire de l’humanité. Atlas est une ode à cet instinct primordial.

Les poupées (2020) est une création pour le jeune public. Le point de départ est la biographie de Michel Nedjar, artiste plasticien apparenté à tort à l’art brut, qui, depuis 60 ans, ne cesse de renverser les normes. Suivant le fil de cette trajectoire hors des cadres prédestinés, Vincent Fortemps, plasticien, et Claire Malchrowicz, danseuse, explorent ces instants étincelles où l’on peut naître à soi-même et devenir créatrice et créateur de sa propre identité : A quels moments, et comment les corps ont décidé de déranger et déplacer les carcans, les codes sociaux, culturels et éducationnels dans les- quels ils étaient contraints ? Quelle est cette première rencontre avec soi-même

Knit (2021) est une exploration de notre tricotage. Nous tissons une existence faite d’accros, de trames, de broderies, de nœuds, de trous reprisés, de mailles perdues, avec des fils, tendus et distendus, qui nous sont transmis et que nous agençons à notre tour. J’aime ainsi imaginer qu’il a existé un premier tissage tressé de nos récits, comme une mémoire du monde, une matrice de notre humanité et le maillage idéal de nos cultures. Chaque œuvre créée à sa suite pourrait alors être envisagée comme un palimpseste, fonctionnant par transformation ou par imitation. Une élasticité qui symbolise notre perpétuelle adaptation.


A PROPOS DE ELISE BLACHÉ, chargée du développement et témoin des Laboratoires de Traverse depuis 2015.

Elise Blaché est dramaturge

Curieuse des projets hybrides, elle aime embarquer pour des aventures à la marge. Elle s’intéresse à un théâtre en prise avec notre aujourd’hui et particulièrement à l’articulation de la pensée philosophique et politique au concret des agitations de l’intime. Sur son chemin elle fréquente régulièrement la marionnette, le théâtre pour l’enfance et les auteurs contemporains.

Pendant 10 ans, à Marseille, elle a collaboré avec Angela Konrad dont elle a accompagné tous les projets de 2001 à 2010 sur des textes de Elfried Jelinek, Shakespeare, Heiner Müller, Molière, Gabily, Mozart-DaPonte, Euripide, Liliane Giraudon, Sénèque, Maeterlinck… Elle accompagne régulièrement des metteurs en scène et des auteurs dans leurs créations : Jacques David, Emilie Flacher (Cie Arnica), Nathalie Brücher, Benoît Di Marco, Anne-Christine Tinel, Charles Salvy…

 

Depuis 2010 elle fait partie du comité de lecture A Mots Découverts qui accompagne les auteurs dans le temps de l’écriture ; à partir de novembre 2014 elle initie et coordonne avec ce collectif le festival biennal Les Hauts Parleurs à Paris. En 2018 elle participe à la création de la revue La Récolte dont elle devient co-rédactrice en chef avec Simon Grangeat

A PROPOS DE CATHY BLISSON, auteure témoin des Laboratoires de Traverse de 2012 à 2018.

Cathy Blisson est journaliste, dramaturge et auteure.

Pendant huit ans à Télérama, elle s’est spécialisée dans la couverture de la création contemporaine hybride, à la croisée des disciplines scéniques et autres arts visuels. Exerçant aujourd’hui en freelance, elle collabore notamment avec la revue Mouvement, où elle tient une chronique dédiée aux « objets artistiques transgenres ».

Elle poursuit parallèlement des projets personnels d’écriture textuelle et sonore, en particulier à travers le collectif &., qu’elle fonde à l’automne 2014 avec Anne Quentin (également journaliste et auteure), et travaille avec le Groupe Berlin à la conception du projet Zvizdal (création en mai 2015 au Kunstenfestivaldesarts).

Dramaturge, elle accompagne par ailleurs les démarches d’équipes en recherche (Cies Un Loup Pour l’Homme, In Vitro, Le Clair Obscur…), à qui elle prête sa plume et un regard extérieur.